Dans mon article précédent, j’avais fait allusion à la mort de Michel Baroin, en 1988. C’est en enquêtant sur cet événement que Dominique Lorentz, initialement conseillère en communication, a découvert une affaire d’État et est devenue, presque malgré elle, journaliste d’investigation. Ses découvertes l’ont amenée à écrire un livre, Une guerre (Les Arènes, 1997), dans lequel elle établissait notamment un lien entre l’« accident » d’avion du PDG de la GMF et le rôle de celui-ci dans les affaires atomiques franco-iraniennes. Notons cependant que, selon d’autres sources, c’est en décidant de se porter candidat aux élections présidentielles de 1988 que l’ancien Grand-Maître du Grand-Orient de France aurait signé son arrêt de mort.
Poursuivant ses recherches, Dominique Lorentz a fait d’autres révélations édifiantes dans un gros ouvrage, Affaires atomiques (Les Arènes, 2001). Enfin, elle a publié plus récemment un essai (Des sujets interdits, 2007) relatant les tuiles qui lui sont arrivées à partir du jour où elle a voulu se faire éditer : les portes qui se fermaient mystérieusement devant elle, le cambriolage de son appartement, des menaces de mort, l’impossibilité de retrouver un emploi… Tout cela pour avoir percé à jour des secrets parmi les mieux gardés, et surtout, pour avoir voulu les partager avec le public. Là est sans doute le plus remarquable, chez cette femme courageuse et tenace : car d’habitude, ceux qui savent se taisent.
Naturellement, il se trouvera toujours des fort-en-thèmes pour contester les dires de Dominique Lorentz et pour mettre en doute la rigueur de son travail de recherche. Quelques citations seront peut-être la meilleure réponse à de telles critiques :
« Elle n’avait pas le droit d’écrire sur ces sujets. Ce sont des sujets interdits. »
(le Quai d’Orsay)
(un rédacteur en chef de L’Express)
Après avoir lu des ouvrages aussi éclairants, il devient plus difficile de parler de politique : on s’aperçoit que tout ce que l’on croyait savoir était faux, et cela vous rend plus humble et plus modeste ; et dès lors, les opinions entendues à gauche et à droite sur tel ou tel sujet, qu’il s’agisse du nucléaire, du terrorisme, de l’Iran, du Proche-Orient ou de la mondialisation, paraissent généralement insipides, voire grotesques.