Un ami a attiré mon attention sur un article de presse concernant une session expérimentale de présentation du clavecin à des enfants âgés de 5 à 6 ans, à Chartres.
Irène Assayag, professeur de clavecin et de musique ancienne, « accueille les mercredis et samedis huit jeunes élèves », et « une vingtaine d’enfants » d’une école maternelle ont pu se familiariser avec l’instrument « pendant un trimestre ». Pas très clair, mais là n’est pas l’important.
« Pour montrer que le clavecin n’était pas réservé à quelques-uns, explique le professeur, j’ai ouvert cet atelier avec les enfants en septembre dernier. »
Je me demande en effet jusqu’à quand il faudra essayer de faire comprendre aux gens que ni la musique classique, ni aucun instrument, ne sont réservés à un petit nombre d’élus.
« Pour Jilali Tazi, informaticien, père de Shirine et de son frère Ismaël, découvrir le clavecin a été une évidence : « J’ai toujours voulu donner à mes enfants une grande ouverture d’esprit. Si cela peut contribuer à leur épanouissement, c’est formidable. » »
Ce monsieur sait-il à quel point il a raison ?
Si jamais ses enfants finissent par étudier sérieusement le clavecin, leur apprentissage ne se limitera pas à la maîtrise d’un instrument de musique. Ils seront amenés à découvrir le répertoire baroque en général, c’est-à-dire toute la musique composée entre le tout début du XVIIe et le milieu du XVIIIe siècle. Il y a des chances pour qu’ils s’intéressent aussi à la musique qui précède ce répertoire et à celle qui lui succède.
Ils seront amenés également à connaître la raison pour laquelle on emploie le mot « baroque ». Ils entendront alors parler de la Contre-réforme et de son influence déterminante sur les arts. Ce faisant, ils acquerront peut-être quelques notions d’architecture baroque.
Ils suivront des stages d’été au cours desquels ils seront initiés à la danse baroque et à la rhétorique baroque. Cela leur permettra de mieux comprendre certaines peintures et sculptures de cette époque. Par la même occasion, il y a des chances pour qu’ils découvrent aussi la musique et les danses de la Renaissance. Par la suite, il n’est pas impossible que leur voyage initiatique inclue la musique médiévale.
Ils apprendront la basse continue, comme tout claveciniste qui se respecte, et cela leur permettra de mieux accompagner des chanteurs, des violistes, des flûtistes et autres instrumentistes, dans des œuvres profanes ou sacrées.
Ils s’initieront à l’orgue. Ils sauront le pourquoi et le comment des différences entre la liturgie catholique et la liturgie protestante, au moins du point de vue de la musique. Ils apprendront quelles sont les parties successives de la messe. Immanquablement, ils admireront les merveilles de la musique chrétienne de cette période de l’Histoire, qui est un sommet inégalé de la création humaine.
Voilà comment, par la musique, on apprend à connaître et à admirer le patrimoine historique, culturel, religieux et artistique de la France et de l’Europe.
Je ne peux manquer de relever que les trois enfants nommés dans l’article en question – et photographiés – se prénomment Nabintou, Shirine et Ismaël. Je ne peux manquer non plus de relever que la personne qui leur ouvre de telles perspectives s’appelle Irène Assayag.